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Mme JAGER travaille à la Commission européenne depuis 2005, débutant en tant que Directrice de la sécurité à la DG Énergie et Transports, puis devenant Directrice des dossiers internationaux liés à l’énergie et aux transports et de la coordination, ainsi qu’à la tête du Cabinet du Commissaire aux Transports. Elle est désormais Directrice générale adjointe de la Direction générale des Partenariats internationaux (DG INTPA). Avant de rejoindre la Commission, Mme JAGER a travaillé pendant plus d’une décennie sur l’adhésion de la Slovénie à l’UE au sein du ministère des Affaires étrangères et a été la première cheffe adjointe de la Représentation permanente (Coreper I) de la Slovénie auprès de l’UE.

  1. Comment le nouveau projet « P2P for BO » (Peer to peer pour les organismes de bassin) s’inscrit-il dans la mission principale des Partenariats Internationaux, qui consiste à formuler la politique de partenariat et de développement international de l’UE, avec pour objectif ultime de réduire la pauvreté ?

L’UE considère l’eau comme un moteur clé soutenant tous les objectifs de développement durable. Après avoir déboursé 2,6 milliards d’euros lors de la période de programmation précédente (2014-2020), l’UE a déjà engagé 1,4 milliard d’euros pour 2021-2023. Mais la contribution européenne à l’eau va bien au-delà du soutien financier. Elle offre des partenariats, de l’autonomisation et de l’ambition en utilisant les investissements de Global Gateway pour réduire la pauvreté et faire de la sécurité de l’eau une réalité mondiale.

Tout d’abord, les partenariats. Nous savons que les eaux partagées, des plus grands fleuves transfrontaliers du monde aux plus petites sources, peuvent rassembler des pays et des communautés. Des partenariats renforcés en matière d’eau, qu’ils traversent des frontières géographiques ou sectorielles, reposent sur de bons partenaires – parmi les autorités régionales, nationales et locales, la société civile, les entreprises et les investisseurs. De tels partenariats catalysent la gouvernance, les compétences et les financements. En les faisant travailler ensemble, l’objectif est de combler le fossé financier de l’eau afin d’atteindre l’ODD 6.

L’autonomisation est donc importante. L’UE travaille à toutes les échelles pour améliorer le paysage de la coopération en matière d’eau. Au niveau mondial, en soutenant l’élargissement des parties à la Convention sur l’eau ou au niveau régional avec deux initiatives Team Europe promouvant la gestion transfrontalière de l’eau en Afrique et en Asie centrale. Dans ce cas, les organisations de bassins lacustres et fluviaux jouent un rôle central dans l’orchestration des politiques au niveau des bassins versants, ce qui en fait des acteurs clés dans la mise en œuvre de cadres de gestion intégrée des ressources en eau.

L’ambition de l’UE de soutenir l’apprentissage entre pairs entre les organisations de bassins lacustres et fluviaux est de les amener à partager des stratégies, pratiques et outils efficaces. Le projet InterAgencias mis en œuvre par OiEau entre les agences de bassin brésiliennes et françaises en est un bon exemple. Ce projet a permis aux gestionnaires de l’eau des deux pays de collaborer pour élaborer des plans de prévention de la sécheresse et des inondations, contribuant ainsi à la résilience des communautés face aux catastrophes naturelles causées par le changement climatique.

  1. Comment les échanges sur leurs meilleures pratiques, leurs expériences échouées, etc., aideront-ils les BO et les autres parties prenantes à améliorer l’efficacité de leur gestion des ressources en eau, à contribuer au développement durable et à promouvoir la démocratie ?

L’échange de bonnes pratiques et d’expériences échouées fournit aux organisations de bassins de lacs et de fleuves des informations précieuses et des leçons tirées par les praticiens, avec des solutions testées par leurs pairs. Cela peut les aider à éviter des pièges communs et à mettre en œuvre des stratégies efficaces. C’est ce qui s’est passé dans le bassin versant de la rivière Bandama en Côte d’Ivoire. L’agence du bassin Loire-Bretagne a soutenu les autorités nationales dans l’élaboration du schéma de développement et de gestion du bassin versant. Ce partenariat a permis d’identifier des mécanismes de gouvernance adaptés pour planifier l’action au niveau du bassin.

En Europe, la géographie parle d’elle-même. Avec 60 % du territoire couvert par des bassins fluviaux transfrontaliers, les réalités hydrographiques ont forcé les pays européens à coopérer. Ce que nous avons appris de cela, c’est que lorsque vous gérez des ressources partagées de manière coopérative, vous construisez la paix et la prospérité, comme c’est le cas pour le Danube, qui traverse 19 pays.

Pour exploiter pleinement le potentiel de la coopération en matière d’eau, l’adoption de la Directive-cadre sur l’eau (DCE) en 2000 a permis à l’UE de disposer de l’une des législations environnementales les plus avancées au monde. La DCE a traduit en règlement l’idée centrale que l’UE doit protéger et restaurer les écosystèmes d’eau douce pour garantir un approvisionnement suffisant en eau de bonne qualité pour les humains et la nature. En fixant ces objectifs et en mettant en place un cadre pour mesurer les progrès accomplis, la DCE a donné aux gestionnaires de l’eau à travers l’Europe un langage commun et une référence intégrant l’ensemble du cycle de l’eau. L’introduction de districts de bassin versant, qui s’étendent au-delà des frontières administratives ou politiques, a créé un système de gouvernance qui place l’eau en priorité et encourage la coopération avec de multiples parties prenantes. L’application de ces districts a créé de nouveaux espaces démocratiques pour que les pays discutent de la manière dont ils entendent gérer leurs masses d’eau partagées.

Promouvoir la démocratie de l’eau dans ce cas signifie impliquer un large éventail de parties prenantes dans le processus décisionnel pour identifier une voie à suivre. Cette approche inclusive garantit que les voix des différents groupes sont entendues et prises en compte, conduisant à des solutions de gestion de l’eau plus transparentes et responsables. Des solutions qui dureront car elles sont détenues par les populations.

  1. Les équipes du RIOB et de l’OiEau considèrent ce projet comme une véritable reconnaissance de leur expertise. Pourquoi la DG INTPA nous a-t-elle choisis pour diriger et coordonner ce projet ambitieux ?

Les raisons sont doubles. Premièrement, le RIOB possède l’un des réseaux les plus étendus d’organisations de bassins lacustres et fluviaux dans le monde. Deuxièmement, l’UE a un bilan positif avec OiEau dans la mise en œuvre de l’Initiative pour l’eau Plus dans le cadre du Partenariat Oriental. L’objectif en encourageant l’apprentissage entre pairs entre les organisations de bassins lacustres et fluviaux est de combiner ces dynamiques de manière plus large. Cette ambition s’inscrit dans un contexte plus large, puisque Team Europe (Commission européenne, Banque européenne d’investissement, États membres de l’UE) met ensemble plus de 1,1 milliard d’euros à disposition pour la coopération en matière d’eau transfrontalière, afin de travailler sur la gouvernance améliorée, la connaissance et les investissements dans 18 grands bassins transfrontaliers en Afrique et en Asie centrale.

Cela signifie que pour mettre en œuvre l’ODD 6.5 sur la gestion intégrée des ressources en eau – à tous les niveaux – les organisations de bassins lacustres et fluviaux sont des acteurs essentiels. Le déploiement complet de leurs capacités et ressources est le seul moyen d’avoir des arrangements pleinement opérationnels pour les bassins fluviaux. Le projet d’apprentissage entre pairs intensifie les efforts déjà menés par l’UE pour renforcer la chaîne de valeur de la coopération mondiale en matière d’eau. En utilisant les directives de l’UE et les principes des conventions des Nations Unies comme références de base, les organisations de bassins lacustres et fluviaux disposent des moyens nécessaires pour élaborer entre elles des cadres de gouvernance adaptés, des plans stratégiques, des outils numériques ou des espaces de dialogue.

L’expérience acquise dans la mise en œuvre de l’Initiative pour l’eau Plus de l’UE dans des pays tels que l’Arménie, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Moldavie et l’Ukraine est un bon exemple sur lequel s’appuyer. Plusieurs exemples ont montré l’appétit de ces pays pour réformer leurs politiques de l’eau et mettre en œuvre l’acquis européen en matière d’eau, avec des mécanismes de partage des connaissances adaptés. L’organisation de dialogues politiques nationaux a permis d’introduire des solutions basées sur la nature comme nouveaux instruments dans certains plans de gestion des bassins fluviaux inspirés des exemples de l’UE et adaptés aux réalités locales.

L’objectif du contrat d’apprentissage entre pairs est d’étudier les besoins des organisations de bassins lacustres et fluviaux pour appliquer des solutions adaptées plutôt que des meilleures pratiques déconnectées. Étant donné que les politiques de gestion intégrée des ressources en eau sont conçues pour refléter la complexité et la diversité des problèmes liés à l’eau, l’application simultanée de leurs objectifs est souvent ardue. En adoptant une approche axée sur les problèmes de la coopération en matière d’eau, en s’appuyant sur l’expérience pratique des organisations de bassins, notre travail peut se concentrer sur des domaines où le changement est possible grâce à l’action collective.

De nombreux exemples ont prouvé que le partage des connaissances entre pays ouvre la voie à la construction de consensus, débloquant finalement les débats politiques et créant sur le long terme des bases plus solides pour la coopération en matière d’eau. L’UE poursuivra ces efforts avec le RIOB et OiEau.